Près de 30 ans après l’assassinat, en Haïti, du père montfortain Jean-Marie Vincent, engagé dans la défense des paysans, la justice haïtienne, lacunaire et débordée, n’arrive toujours pas à trouver ses assassins :
“La justice est muette depuis 30 ans sur l’assassinat du prêtre catholique engagé de la congrégation des Montfortains Jean-Marie Vincent, abattu par balles à l’âge de 48 ans, dans la soirée du 28 août 1994, à l’entrée de la résidence des Pères Montfortains à Port-au-Prince, observe AlterPresse.
Tout au long des 30 années écoulées, diverses organisations de la société n’ont pas cessé de réclamer justice pour ce crime.
« Nous ne comprenons pas pourquoi les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire ne prennent pas leurs responsabilités, afin de faire la lumière sur cet assassinat et punir les criminels », écrivaient dans un communiqué en 2017 la Fondation Jean-Marie Vincent, le Réseau des organisations de la zone de l’Ouest (Rozo), l’Asosyasyon militan alfa pou patisipasyon pèp la (Amapp) et l’Union nationale des normaliennes et normaliens haïtiens (Unnoh).
Quels sont les potentats dans l’État, qui n’ont pas intérêt à donner justice à la victime ?, se demandaient-elles.
Au cours des dernières années, la justice a totalement fait silence sur le dossier, enfoui aujourd’hui dans des tiroirs où périodiquement de nouveaux cas, les uns plus crapuleux que d’autres, s’entassent.
Ordonné prêtre le 8 janvier 1971, le père Jean-Marie Vincent a contribué, entre autres, à la formation des mouvements populaires et sociaux en Haïti, notamment la mise en place des gwoupman Tèt ansanm (groupes communautaires de paysannes et paysans) et la constitution de mouvements paysans très solides dans le Nord-Ouest, comme Tèt ansanm, qui sera transformé plus tard en Tèt kole ti peyizan.
Il a échappé à plusieurs tentatives d’assassinats, de la part de grandons (grands propriétaires terriens du Nord-Ouest), en 1986 et 1987.
En revenant d’une célébration, organisée à Pont-Sondé (Bas Artibonite), à la mémoire des victimes du massacre de Jean-Rabel (département du Nord-Ouest) le 23 juillet 1987, Jean-Marie Vincent a eu un bras cassé et de graves blessures à la tête, à la suite d’un guet-apens militaire, perpétré le 23 août 1987 à Freycineau (à environ trois kilomètres au sud de Saint-Marc).
Jean-Marie Vincent a été d’un apport important, avec l’équipe missionnaire de Jean-Rabel (composée d’Haïtiennes et d’Haïtiens, ainsi que de ressortissantes et ressortissants étrangers) au relèvement des conditions paysannes dans cette municipalité du Nord-Ouest d’Haïti. Il a également œuvré, au Cap-Haïtien, dans la Caritas du Nord, une structure au sein de l’église catholique tournée vers des actions plutôt sociales, à côté des actions évangéliques.
Jean-Marie Vincent voulut également implanter des structures alternatives de financement, dans l’objectif de favoriser des investissements durables chez les communautés de base, en particulier paysannes.
Né le 21 octobre 1945, d’une famille de Baradères (département des Nippes, une partie du Sud-Ouest d’Haïti), Jean-Marie Vincent a été assassiné, à l’âge de 48 ans, par des hommes armés devant la maison des Pères Montfortains, à la rue Baussan à Port-au-Prince“.
Source : Alter-Presse